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Economie et Politique sont dans un bateau...

Mars 2017

Publié le
1 mars 2017
Temps de lecture
7 minute(s) de lecture

A destination des investisseurs professionnels uniquement.

Ne convient pas aux investisseurs de détail en Belgique.

Constatant que chaque aléa politique de 2016 s'est soldé par un glissement progressif vers davantage de soutien fiscal, et une réaffirmation du soutien monétaire des Banques centrales, les marchés continuent de déguster avec gourmandise la plus nette reprise cyclique rencontrée depuis la fin de la grande crise financière. Le cycle américain est déjà bien avancé, mais le « Trumpisme » laisse espérer qu'il se poursuive encore.

Quant à l'Europe et au Japon, leur retard dans le cycle global leur confère une marge de progression encore appréciable. Les investisseurs anglo-saxons demeurent certes prudemment à l'écart de l'Europe « au cas où ». Car la perception du risque politique en France dépasse étonnamment celle qui prévalait au début de 1981, avant l'élection surprise de François Mitterrand à la Présidence française. Cette crainte proroge la lancinante sous-performance des marchés européens, et a commencé à faire se tendre la prime de risque sur les emprunts souverains français. De plus, les indicateurs techniques de marché commencent à émettre leurs premiers soupirs de fatigue.

Mais portés par la réalité économique, les marchés d'actions continuent d'escalader à bon droit, fût-ce laborieusement en Europe, le mur des inquiétudes. Peut-être tout à ce réconfort et à leur fascination pour l'agenda politique, les marchés continuent de négliger un des risques les plus concrets pour 2017 : la confirmation de tensions inflationnistes grandissantes (voir notre Note de janvier « 2017 : attention à ce que vous souhaitez »).

Quand l'économie va...

Trump provoque aux États-Unis une fracture sociétale mais un grand enthousiasme au plan économique

Le « personnage » Trump continue de susciter une grande perplexité chez les observateurs. Mais « l'imprévisibilité » qu'il incarne constitue un risque en réalité tempéré, d'abord par le mode opératoire emprunté, qui est beaucoup moins inefficace qu'il y paraît : l'intensité quotidienne de messages courts et superficiels permet une grande ductilité de la communication, qui est prise de moins en moins littéralement. Par ailleurs, l'inexpérience de Donald Trump dans des domaines essentiels l'a obligé à s'entourer, comme le fit Ronald Reagan en son temps, de professionnels très aguerris. Par ailleurs, sa vision économique n'est nullement imprévisible : Donald Trump poursuit une forme assez primitive mais cohérente de mercantilisme, qui érige l'État en acteur décisif au service des intérêts de l'économie américaine et du rétablissement de sa balance commerciale.

Dès lors, la ligne directrice des initiatives économiques est assez lisible, pour les États-Unis comme pour ses partenaires commerciaux. Quant à leur ampleur, elle sera inévitablement modérée par le contrôle qu'exerce un Congrès très conservateur sur les principaux enjeux budgétaires et fiscaux. Il en ressort pour les américains certes une fracture certainement profonde au plan sociétal, mais aussi un enthousiasme assez unanime au plan économique : l'indicateur de confiance des consommateurs a fortement rebondi depuis le 9 novembre dernier. Plus décisif encore pour l'investissement, l'indice d'optimisme des entreprises de taille moyenne s'est envolé depuis l'élection, pour atteindre son plus haut niveau depuis 2004.

Comme pour valider ce regain « d'esprits animaux », les résultats des entreprises américaines se sont inscrits en hausse de 5% en moyenne au dernier trimestre 2016, une performance supérieure dans deux tiers des cas aux attentes des analystes.

En Europe, il est frappant également que la perspective d'échéances politiques majeures en 2017 n'entame pas le redressement du cycle économique : l'indice PMI des directeurs d'achat de la zone euro vient encore de déjouer les attentes majoritairement pessimistes en progressant de 1,6 point en février pour atteindre 56, un niveau que l'Europe n'avait pas connu depuis avril 2011. En conséquence, les analystes continuent de relever leurs estimations de résultats des entreprises pour 2017, qui sont attendus désormais en hausse en moyenne de 15%.

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Source : Carmignac, CEIC, février 2017

Si l'aléa politique empêche les marchés européens de saluer pour l'instant à sa juste mesure ce retour à meilleure fortune économique, un passage sans encombre dudit aléa dans quelques mois pourrait donner alors le signal d'un rattrapage vigoureux des marchés actions et de l'euro (a fortiori si les succès électoraux se sont construits sur des programmes économiques pertinents).

La menace fantôme

Le risque électoral européen ne peut pas être écarté d'un revers de main. On voit mal en effet pourquoi le vent de populisme qui balaie la scène politique mondiale depuis plus d'un an s'arrêterait magiquement aux frontières de la zone euro. Le partage très inégal des bienfaits de la globalisation au sein des économies développées a ouvert un boulevard au credo souverainiste, que la pression migratoire a élargi. Si le débat pré-électoral devait se cristalliser principalement autour des seules thématiques identitaires et instinctivement protectionnistes, alors l'examen des conséquences économiques de chaque programme serait relégué au second plan, ouvrant ainsi la voie à des propositions démagogiques et destructrices de richesse pour tout le monde.

Le phénomène Trump n'est pas transposable aux pays européens

L'élection de Donald Trump fut transgressive, et pourtant favorable à l'économie américaine (pour l'instant). Mais ce phénomène n'est pas transposable aux pays européens. En effet, l'application d'un programme de nationalisme économique quand on dirige la première économie du monde peut être imposée de force, au moins quelques temps, à ses partenaires commerciaux (même si cette posture est potentiellement très problématique à terme). A contrario, aucun pays européen aujourd'hui, pas même l'Allemagne, ne peut s'offrir le luxe de l'isolement économique au sein d'une Europe éclatée. Gageons que le choix du suicide économique sur l'autel de la pseudo-souveraineté retrouvée n'est pas encore majoritaire en France, ni ailleurs en Europe. Les jours qui précéderont les premiers scrutins devront être abordés avec prudence. Les probabilités de choc sont faibles à ce jour, mais les enjeux économiques sont considérables.

Le risque inflationniste toujours sous-estimé

L'accélération des signaux inflationnistes continue d'être largement ignorée

Probablement parce que les esprits n'y sont pas encore préparés, l'accélération des signaux inflationnistes continue d'être largement ignorée, tant par les Banques centrales que par les marchés de taux (voir notre Note de janvier). En janvier pourtant, le rythme annuel de hausse des prix à la consommation aux États-Unis a encore accéléré, passant de 2,07% à 2,5%, en majeure partie à cause de la hausse du coût des transports. En zone euro, le taux d'inflation est passé en janvier de 1,1% à 1,8%.

L'argument selon lequel la hausse récente de l'inflation ne serait que le produit d'un effet de base, par définition transitoire, appelée à se retourner rapidement, ne nous convainc pas. L'augmentation du coût de l'énergie et de l'alimentaire au contraire se diffuse logiquement avec retard à l'ensemble des prix. Aux États-Unis, le rythme d'inflation hors alimentation et énergie atteignait déjà 2,27% en janvier. Et l'effet d'une hausse tendancielle des salaires s'est encore peu fait sentir. Si ce n'était pour la perception du risque politique en Europe, qui comprime les rendements des emprunts d'État refuges et maintient les Banques centrales en alerte, il nous semble que les taux à dix ans américains (2,46% aujourd'hui) et allemands (0,30%) seraient déjà bien plus tendus. Porter son regard au-delà du risque politique actuel en Europe commande de doter les portefeuilles d'une sensibilité très prudente aux taux d'intérêt des principaux pays développés. Nos portefeuilles sont d'ores et déjà positionnés dans ce sens.

En conclusion, le cycle est certes déjà bien avancé aux États-Unis, et le risque politique en Europe n'est pas une chimère. Mais le scepticisme économique ambiant, associé à l'épouvantail populiste en France et aux Pays-Bas a rendu beaucoup d'investisseurs plus frileux depuis le début de l'année sur les marchés d'actions, en particulier en Europe. Cette posture craintive est plutôt rassurante d'un point de vue technique sur cette classe d'actif, d'autant qu'elle néglige la possibilité qu'une dissipation du brouillard politique donne bientôt davantage d'ampleur à une reprise cyclique européenne encore timide. En revanche, elle sous-estime le risque que fait courir aux marchés de taux la persistance probable selon nous des tensions inflationnistes.

Source: Bloomberg, 01/03/2017

Stratégie d’investissement
Les actions

Les marchés actions ont débuté l’année sur une tendance résolument positive. L’ensemble des zones géographiques aura progressé, même si on note que l’Europe, en dépit de solides chiffres macro- et micro-économiques, sera restée à la traîne en raison des incertitudes politiques. Si notre taux d’exposition reste proche du maximum autorisé, notre construction de portefeuille se veut toujours sélective et équilibrée.

Sélective en nous positionnant sur des sociétés à même de profiter de l’accélération du cycle économique, mais dont les fondamentaux sont également solides.
C’est typiquement le cas du fabricant d’équipement pour la production de semi-conducteurs ASML Holdings dans lequel nous avons investi récemment : une société à la fois exposée au cycle économique, mais dont la position de leader et la solidité de son bilan assurent une bonne visibilité.

Équilibrée en construisant des positions au-delà de notre thématique de reflation. C’est ainsi le cas de deux valeurs introduites récemment dans notre stratégie actions globales : la société américaine de jeux vidéo Activision Blizzard dont le changement de business model est encore mal appréhendé par le marché (avec des revenus plus réguliers et moins liés à la sortie de « hits »).

La gestion des risques reste enfin bien présente dans notre stratégie actions globale à côté de notre positionnement constructif sur les marchés. Nos positions sur les mines d’or ont ainsi enregistré de belles progressions depuis le début de l’année et continuent d’équilibrer le risque global du portefeuille.

Si l’inflation a continué d’accélérer dans l’ensemble des pays développés, les taux longs nominaux sont eux restés relativement stables. Nous continuons de penser que les investisseurs sont trop conservateurs dans leurs anticipations d’inflation : la hausse des prix nous semble en effet plus diffuse et pérenne qu’un simple effet transitoire lié au rebond des prix du pétrole. En conséquence, nous nous sommes positionnés sur les obligations souveraines américaines indexées sur l’inflation, de façon à réduire le risque de notre stratégie obligataire, tout en nous protégeant de la remontée de l’inflation.

Nous avons enfin procédé à des arbitrages au sein de notre allocation sur les dettes émergentes en soldant notre position sur les taux polonais et en introduisant une position vendeuse sur les taux hongrois. Nous voyons en effet se dessiner une dichotomie marquée au sein de l’univers de la dette émergente, entre d’une part les pays importateurs de matières premières comme la Hongrie, dont l’inflation accélère fortement et dont les rendements obligataires sont encore très bas ; et d’autre part les pays exportateurs de matières premières, dont la dette offre des rendements élevés et dont l’inflation ralentit fortement. C’est typiquement le cas du Brésil, notre première position en dette émergente, dont l’inflation vient de passer sous les 5,5% et où la Banque centrale peut désormais enclencher un cycle agressif de baisse des taux avec deux réductions de 75 points de base de son taux directeur depuis le début de l’année.

Le dollar a alterné phases de baisse et de hausse depuis le début de l’année sans qu’une tendance claire se dessine. Ceci valide notre scénario selon lequel le consensus très positif sur le dollar limite le potentiel d’appréciation supplémentaire du billet vert. En conséquence, notre stratégie de change a graduellement renforcé son exposition sur l’euro au détriment de la devise américaine.

Alors que l’Europe entre dans une période riche en échéances électorales, nous avons privilégié la constitution de positions diversifiées sur des monnaies refuges comme le franc suisse ou le yen pour piloter le risque global de nos portefeuilles. On notera enfin la poursuite du rebond des devises émergentes, dont nous profitons sur nos positions en monnaies locales non couvertes du risque de change comme par exemple au Brésil.

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